203 - MEDARD DE NOBLAT

* ATTENTION : IL Y A UN LIEN SUR LE TITRE
Devinez quoi !! Je suis excité comme une puce héroïnomane. Comme un héron disgracieux engoncé dans ses grôles de chantiers, comme le pou de la tête à Toto, comme le sourire d'André Pousse, comme le troisième mari de Mireille Matthieu........Ce qui n'est rien de le dire......et encore moins de l'être !! Et cessez donc de rire niaisement, tas de cloportes amputés !! Et pourquoi qu'il est excité le Coco à son Coke ? Parce que Médard de Noblat vient de sortir du magasin !!! Oui, bon ok, il a dû mourir en 1930 ce n'est évidemment pas lui. Allez, pour vous situer, un petit historique :

"Tout d’abord sous le nom de Giraud, une des plus anciennes manufactures de Limoges datant de 1836, la société rachetée en 1989 et rebaptisée Médard de Noblat, a fortement contribué au rayonnement de la porcelaine de Limoges dans le monde en exportant massivement vers les Etats unis, le Japon et l’Europe, ayant servi par le passé d’illustres personnalités, telles que le Shah d’Iran, le Pape Jean XXIII, le Général de Gaulle, ainsi que les hôtels Georges V à Paris, Nikko, les établissements de Michel GUERARD à Eugénie les bains et Awashima au Japon. Fidèle à la tradition de qualité et de créativité qui lui a permis de travailler avec ces noms prestigieux, Médard de Noblat a su, par des investissements technologiques de pointe et sa collaboration avec des designers talentueux, s’imposer comme une des marques les plus renommées de la Porcelaine de Limoges."

Donc, je n'hésite pas à sacrifier sur mon temps de travail (de toutes façons, esclave que je suis, je peux m'offrir ce luxe et toc !) pour vous faire partager ma joie immense, mon incrédule émerveillement de constater que cette pointure de la porcelaine a pris sur son emploi du temps trés préssé montréalais pour venir nous visiter. Ayi ayi ayi. Je n'en reviens pas !!! Bon, un tour sous la douche et je vous reviens............Le XV de France dénudé dans mon salon ne m'aurait pas fait plus d'effet.......enfin si bien sûr, mais sur un simple plan ....euh technique ! Encore que...!

Bouh, ça va pas mieux, mais j'ai rassemblé mes pensées.

Donc, rapide révision des événements.

Il y a quelques temps, en recherche de nouveaux fournisseurs de porcelaine, je contacte Médard de Noblat (Deshoulières me plantant là pour une obscure raison d'exclusivité !), Haviland, bref tous les porcelainiers de Noblat, Limoges, St Yrieix La Perche......... Sans trop y croire, mais sait-on jamais. Particulièrement en ce qui concerne les plus prestigieux, et ceux à qui je voue une admiration non feinte. Et, mis à part, la Manufacture de porcelaine de Monaco, il n'y a guère que Médard qui me transporte au Purgatoire sans ascenseur. Je prends donc langue avec la directrice export, Elise Charruau à laquelle j'expose mes besoins et mes craintes du prix trop élevé de ses produits. Mais l'audace force toutes les portes et fait croître tous les courages. Même celui du ridicule ! Et voilà que je reçois une réponse 1) rapide, 2)fort courtoise pour ne pas dire amicale, 3) contenant une offre très alléchante ! Hélas, pour alléchante qu'elle soit, il est encore loin de la langue sur les babines ! Un rapide calcul me conforte dans l'idée qu'une fois transformé, la tasse à thé serait détaillée à 60 $. Une fortune pour içi. J'en fais donc part à Elise, qui me fait une contre-proposition qu'il m'est de plus en plus difficile de repousser, ce que je fais nonobstant, cédant aux explications rabat-joyeuses de la Raison cette garce ! Nous en restons donc là, non sans que dans un dernier effort pour emporter le morceau (j'espére l'attendrir encore la gentille et douce Elise avec le côté désargenté et bohême mais néanmoins bourré de talent maudit de l'artiste qui se morfond, la chaîne cadenassée à son coup, eructant son mal-être devant son écuelle dans laquelle une eau glauque croupit, encore.) je joins à mon dernier courrier quelques photos choisies de mon art, pardon (il faut que je m'oblige à écouter ma psychotérapeute et amie chère, Sabine) de MON ART ! A la suite de quoi, hélas, Elise (ôô) se ferme à ma messagerie et à ses lettres. Façile,oui mais encore fallait-il le faire !

Aujourd'hui 26 Septembre, 15:06 et quelques poussières échappées à Cronos et au Swivel Swiffer, assis dans l'atelier, le nez dans l'écran du PC, les doigts sur les touches du clavier, j'entends à l'étage une voix claire et cristalline à l'inimitable accent français (Si, si j'ai essayé. Verdict : inimitable ! Alors, hein, quand je vous le disais !).

"- Bonjour ! Maurice ?" dit-elle s'adressant à Daniel.

Devant les dénégations de ce dernier, elle se présente :

"Je suis Médard de Noblat"

Moi, je n'ai pas entendu. Je retiens juste la mention de mon prénom. Je subodore, je crains et redoute que Daniel va m'appeler. Je le pressens, j'entends déja son pas lourd (!) dans l'escalier branlant. Je peste intérieurement. "Fais chier" (Oui, je peux être commun à l'occasion !), je rassemble mes effets épars, runners, chaussettes (Il fait très chaud en ce moment à Montréal, bande d'énergumènes obsédés !), kippa, faux-cils et étole de bison, je m'apprête, jette un regard négligent mais affûté à mon reflet dans le miroir (Bouh, si je me connaissais pas, pour un peu je m'inviterais à sortir tiens), sûr de mon effet et je monte royal, impérial, d'un air las et désabusé de petite fille riche carrossée par Valentino (Beurk !) Et là, Pan, sur le cul. Comme un Patriot sur Kaboul en friche.

- Bonjour, je suis Médard de Noblat !

- Arrgghhh, je suis une crotte obscéne qui ne mérite pas l'empreinte de ton talon aiguille, lui dis-je l'oeil par terre et la langue dessus. Ou quelque chose du genre

Bref, nous sommes restés à parler ensemble durant 35-40 minutes. Elle était accompagné de son agent sur Vancouver qui va donc représenter Médard sur le Canada. Arrêtées pour quelques heures sur Montréal, elle a voulu prendre le temps de la visite.

"J'ai beaucoup aimé les photos que vous m'aviez envoyées et je voulais voir de plus prés."

Nous avons échangé nos cartes.

"Je pense à vous. Je vous ferais part de notre prochaine promotion. Ce serait bien si nous parvenions à travailler ensemble. Je vais voir ce qu'on pourrait faire.

- J'en serais ravi véritablement. Peut-être pour la nouvelle collection "Grand Siécle" qui va necessiter moins d'heures de travail.

Elle a fait l'acquisition d'un plat à cake. Coco Jeangrand, l'agent, celle d'un service à trempette. Elles sont reparties tout sourire avec leurs paquets sous les bras, la promesse que nous leur enverrions un catalogue, et qui sait, s'il y a une place pour nous à Vancouver.

Elle n'était pas en bas de l'escalier que Daniel et moi sautions, au figuré, sur place.

Vous pensez sans doute que c'est un peu enfantin. Et c'est vrai. C'est comme de voir le Père Noël quand on a 6 ans........et qu'On y croit encore bien sûr ! J'ai pour cette firme une passion qui ne date pas d'hier. Si un jour, vous avez l'occasion de mettre la main sur l'un de leurs produits, attardez-vous. Appréciez cette finesse, cette haute voltige des formes, des modelés. Ça n'a l'air de rien, et pourtant, croyez bien que c'est de l'art ni plus ni moins. Réaliser de pareilles piéces, tout en finesse et légereté, jouer avec les incrustations, les modelés, la complexité des formes et des éléments touche à l'excellence. Et je compte pour rien la beauté, la transparence et la blancheur de leur porcelaine.

J'ai été moins fier des premiéres parutions presse que nous avons eu que de cette reconnaissance là. Rendez-vous compte : elle a pris sur son emploi du temps pour nous faire une visite. Et ce n'est même pas forcément commercial puisque je lui ai dit que ses produits restaient trop chers pour nous.

Donc, oui, j'étais un enfant......Et je crois bien que je vais le rester pour une bonne partie de la journée encore.