lundi, mars 20, 2006

17 - ST PATRICK'S DAY


Première fête de la Saint Patrick !! Toute une ambiance !! Au chapitre des "moins", puisqu'il en faut bien en toutes choses, l'aspect commercial d'une pareille manifestation. On assiste à des chars d'entreprises, ou au mieux, supportés par des annonceurs. Mais après tout, pourquoi pas me direz vous. C'est une occasion unique de reconnaissance, de publicité et cela permet d'ajouter au spectacle. Qui s'en plaindrait ? Eh bien, pas même nous. Parce que finalement, on préfére cette publicité bon enfant, cet entrain joyeux, à bien des annonces
usées, éculées râbachées et qui finissent par lasser.
Au chapitre des "Plus" : tout. Plus de musique , du folklore à U2, plus de joie débridée, plus de spectacle, et pour celui-ci, il n'est pas forcément sur les chars. D'un particularisme, (enfin, être irlandais n'est pas une généralité en soi !), les irlandais ont réussi à faire ou à générer une communauté. Si Bush a dit un jour :"Nous sommes tous des New-yorkais" au lendemain de ce funeste jour, les irlandais ont commandé :"Vous êtes tous des Irlandais......au moins le jour de la Saint Patrick !!" Et cela fonctionne. Vous n'allez pas me dire qu'il y a plus de 300 000 irlandais sur Montréal tout de même. Et pourtant, chacun y va de son petit drapeau vert, de son chapeau idoine, de sa feuille de trèfle ou d'un tatoo recouvrant, au plus discret, un coin de la joue ou carrément tout le visage. Même nous, nous sommes sentis l'âme bien verte ce jour-là. Et que la France ait battu l'Irlande au Tournoi des VI Nations ne change rien à l'affaire, ni ne rajoute un quelconque et incongru sentiment de victoire ou de suprématie. Même si on est ben fiers de ça. Allez les bleus !!!!
Au début, nous n'étions pas sûrs du lieu de la parade. Même si les journaux informaient qu'elle se tiendrait sur Ste Catherine, c'est une indication vague concernant une artère de Montréal longue de 30 kilomètres !! Le fait de savoir que cela se passait en centre-ville, aide un peu plus, mais guère non plus : entre l'est et l'ouest de la rue en centre-ville, cela représente encore une dizaine de kilomètres. Heureusement, sitôt rendus dans le métro, on s'est pognés sur des hauts de forme verts, des revenants du XVII° en costume d'époque, et autres fantômes bariolés qu'il nous a suffi de suivre pour parvenir en plein sur le cortège. Vous revoyez sans doute tous, ces petits papiers, virevoltants au vent, lâchés du haut des gratte-ciel new-yorkais à chaque parade sur la cinquième ou Madison. Eh bien, c'est le même spectacle qui nous a accueilli, dans une ambiance sonore survoltée, la foule riant et s'interpellant. Rendre le sentiment de plaisir est difficile. Mais je vous assure qu'il y a vraiment de la joie qui circule. Les différences s'estompent, les contacts se créent, éphèméres, rapides, à l'occasion d'un détail amusant, un costume réussi, une cane de bière (étrange tolérance en l'occurence : il est absolument interdit de circuler dans rue en buvant de l'alcool, ou même en tenant une bouteille si elle n'est pas ensachée), mais peut-être la couleur verte de la cane de bière (vous voyez celle à laquelle je fais référence !) n'est pas étrangère à cette bienveillance......ou bien est-ce le manque de contrôle : la police elle aussi défilant !! Quoiqu'il en soit, on sent que les gens sont là pour s'amuser. Ils s'interpellent. A côté de nous était une femme. S'apercevant qu'à 5 ou 6 mètres d'elle, un homme était en train de perdre son mouchoir, qui sortait d'une poche, elle a laissé son sac à notre surveillance, persuadée sans doute que nous ne le lui volerions pas, pour aller prévenir le quidam.

Ce qui m'a sans doute le plus ému, et Daniel avec moi je pense, a été de voir le char de "l'association des résidents de CDN-NDG" (CDN-NDG = un quartier de Montréal Ouest Côte Des Neiges-Notre Dame de Grâce, le quartier où nous avons un temps envisagé d'emménager). Voir tous les drapeaux des différentes communautés qui y habitent, ressentir l'image d'une communauté plutôt que de communautéS, voilà qui donne un sentiment d'appartenance fort et réconfortant.

On sent que chacun a sa place dans cette société. Même si, il ne faut pas se leurrer non plus, une certaine forme d'agacement commence à se manifester, même si les nationalismes s'exacèrbent parfois, ce n'est pour le moment que de légers indices, mais pour autant, à ne pas négliger. Bien au contraire, et il semble que déja les vigilances se réveillent, les campagnes pour dire "Non au racisme" se font plus visibles. La société canadienne est une société d'immigrants. Particulièrement en métropole montréalaise, où plus de 80 langues différentes sont parlées. Cette particularité a donné ses couleurs, ses spécificités, sa culture à la ville. Chacun a apporté à la communauté, et il serait bon que cela perdure ainsi. Quoiqu'il en soit, cela fait chaud au coeur de voir son drapeau tricolore flotter au sein des autres enseignes. Un autre char aussi nous a fait de l'effet. L'antagonisme Québec/Canada n'est pas un vain mot. Au-delà des aspects linguistiques et culturels, cela touche avant tout à une certaine mentalité : les anglo-saxons étant davantages libéraux, et les francophones plus majoritairement progressistes et sociaux. Ce sont deux approches très différentes et cela crée de véritables tensions. Le serpent de mer de la souveraineté est souvent signalé, et encore en ce moment, où l'Europe et la France ont demandé une majorité supérieure à 55 % pour décider de la validité du référendum sur le Montenégro, cela agite l'opinion publique içi et les politiques bien sûr. Du reste, cela a été abordé lors du séjour de Douste-Blazy à Montréal. La crainte des québecquois est que la communauté internationale peine à reconnaître la légitimité référendaire de la souveraineté de la Province, dans le cas où le taux d'expression en faveur de la souveraineté serait en-deça des 55 %. Donc, vous voyez que la question reste d'actualité et toujours sous-jacente. On évite, pays de consensus, de polémiquer, mais il n'en reste pas moins que la volonté indépendentiste est réelle et prompte à s'enflammer. Pour exemple, nous soupions Samedi soir chez Louise G. . Etaient présentes Louise C. et Mariette, une de leurs amies. La conversation a glissé sur la citoyenneté canadienne à laquelle nous pourrions prétendre dans 3 ans. Elles se sont empressées de dire que plus tôt nous l'obtiendrions et mieux ce serait : cela ferait toujours 2 voix de plus en faveur de la souveraineté. Bien sûr, c'était de la joke, mais pas tant !! Dans ce contexte, voir le char des partisans de l'harmonie entre les deux communautés (franco et anglo) ça fait chaud au coeur aussi. De là, nous avons eu l'explication du fameux drapeau canadien bordé de bleu. C'est le symbole de la fusion des deux communautés. Et ce char-là, a reçu un bien bel acceuil. Vous voyez que le défilé de la St Patrick est bien plus qu'une simple affaire irlandaise. C'est la vitrine de toutes les communautés, de tous les combats, de la simple publicité commerciale jusqu'à la sensibilisation aux problèmes de drogues, du cancer du sein, des philosophies...... Bref, un espace privilégié de communication et de visibilité. Et à ce titre, cela confortefinalement sa propre appartenance à l'ensemble, car l'un ou l'autre de ces chars nous concerne au premier chef.


Je pense que vous aurez compris que nous avons été enthousiasmé. Que le simple prétexte de la fête, la promiscuité joyeuse, le tourbillon invraisemblable que cela génère nous rend acteurs et non pas simples spectateurs passifs de l'évenement. Même moi, qui ne suis pas vraiment du genre exhubérant et extraverti, ai senti mes jambes et mes pieds se soulever et battre au rythme des danses celtes, la main s'agitant en signes compulsifs en direction des participants. Je n'irai pas jusqu'à dire que je me sentais vivant, non, tout de même pas. Mais en tout cas, dedans, faisant partie de cet ensemble.

J'ai entendu une fois une personne commenter l'attitude désinvolte typiquement américaine. Cela m'avait paru à l'époque difficile à saisir, aujourd'hui je constate la justesse de ce commentaire, car il est finalement valable içi aussi : l'américain ne craint pas sa société car il sait qu'elle est à son service et non lui qui est au service de la société. Illusoire peut-être, mais juste dans dans cette optique là.

J'ai à disposition des petites vidéos sur le défilé. Ne pouvant les partager avec vous via ORB, et ne pouvant les publier sur ce blog, faites en la demande, je vous les enverrai par courriel.

GLOSSAIRE :

. Supportés : On ne sponsorise pas, on supporte. Bien ou mal, là n'est pas la question !!

. Pognés : tombés sur. J'ai pogné sur ton répondeur. En france, c'est la suite logique : on tombe aprés s'être pogner avec quelqu'un !!

. Cane : la canette,

. Joke : le terme est anglais, le genre français. Plaisanterie. On dit aussi LA JOB, pour LE travail. Y est des choses d'même !!